Conseil en management
9 facteurs clés pour instaurer une culture d'amélioration continue... et la faire durer
Publié le : 05 février 2021 | Dernière modification le : 17 novembre 2023
Trop souvent dans ma carrière j’ai vu et entendu des clients affirmer faire de l’amélioration continue en tentant d’implanter une solution sans connaitre la source d’un problème... Simplement parce que le compétiteur avait choisi cette même solution ou qu’un fournisseur était venu faire une belle démonstration promettant des résultats fulgurants, hélas souvent absents et laissant de grosses dépenses derrière. Malheureusement, fixer un pansement isolé sur une problématique n’est pas faire de l’amélioration continue. Couper des ressources sans planifier la capacité en espérant sauver des coûts n’est pas de l’amélioration continue. L’amélioration continue, c’est d’être en mesure d’éliminer le gaspillage, les pertes de temps et augmenter la qualité. J’aime dire qu’il s’agit de travailler moins, mais travailler mieux. Il faut d’abord comprendre son organisation en mesurant et en maitrisant ses processus clés. Cela permet de travailler sur les bonnes choses, sur les bons objectifs et à résoudre les causes fondamentales des problématiques vers une vision commune, tel est le but final.
Basés sur mes expériences, je vais vous partager 9 facteurs clés facilitants une culture d’amélioration continue dans votre entreprise, petite ou grande, même si vous démarrez à partir de zéro. J’aimerais toutefois souligner que l’amélioration continue n’est pas une mode et que la mise en œuvre de quelques initiatives n’est pas instantanément transformatrice. En effet, la manifestation des bénéfices peut prendre du temps puisqu’il s’agit d’un véritable changement de culture et comme vous le savez, c’est la chose la plus difficile à entreprendre pour un leader. Toutefois, si vous êtes prêt à vous lancer, ces 9 clés vous aideront à y arriver, ou du moins, à vous y préparer.
1- Embarquez toute l’organisation
C’est un grand facteur de succès de la démarche. Ce ne sont pas seulement les personnes au sommet de la hiérarchie ou au bas de l’échelle qui travaillent seules en « silo » qui feront de grandes avancées. Tout le monde doit avancer dans la même direction, même si l’implication est différente. Il faut comprendre les impacts de son propre travail sur les équipes transversales, il faut passer du « eux » au « nous », éliminer les barrières. Pour ce faire, les dirigeants doivent avoir une idée claire de la cible à atteindre (ce que j’appelle l’étoile du nord, eh oui, comme pour les rois mages), et mobiliser les équipes autour de celle-ci afin que chaque action, chaque effort, soient dirigés vers ce but commun. Si un membre s’égare, il peut toujours se référer à son étoile du nord.
2- Planifiez la stratégie et alignez vos objectifs
Faites une planification stratégique une fois par année et revisitez-la souvent. Partant des objectifs stratégiques de l’organisation, des objectifs tactiques et opérationnels doivent en découler de façon cohérente et aller jusqu’aux objectifs des individus. Cette planification stratégique doit ressembler à une histoire ; cohérente et inspirante. Au final, cela donnera du sens au travail des équipes et des individus et tous auront le sentiment de participer à la réussite de leur organisation, ce qui crée un fort sentiment d’appartenance. Il s’agit d’un outil très puissant pour mobiliser. Cela ne doit pas être présenté comme une nouvelle tâche de plus à accomplir, mais plutôt comme une mission faisant partie d’un tout. Pour rendre l’exercice sérieux et afin qu’il ne soit pas abandonné après quelque temps, ajoutez des incitatifs sur les objectifs à accomplir, monétaires ou non. Cela peut être de la reconnaissance, mais elle doit être significative. Lorsque ces objectifs seront fixés, il vous sera alors plus facile de prioriser les projets d’amélioration continue à mettre en œuvre en lien avec ceux-ci. L’idéal dans la sélection des nombreux projets que vous souhaiterez mettre en œuvre est de commencer par les plus petits projets, demandant le moins d’efforts et représentant les plus grands bénéfices.
3- Responsabilisez
Les plus belles histoires d’amélioration à succès dont j’ai été témoin en entreprise sont celles pour lesquelles TOUS étaient impliqués et responsables des résultats. En plus de sauver des coûts, cela facilite la gestion du changement (j’en reparlerais plus loin), assure la pérennité des solutions mises en place et accélère le changement de culture et la mise en œuvre de nombreuses initiatives d’amélioration continue.
Par exemple, mettez en place un comité de transformation composé de chefs d’équipes et de collaborateurs. Listez toutes les initiatives d’amélioration continue que vous souhaitez mettre en œuvre. Puis, à l’aide d’outils de priorisations basés sur les critères des objectifs stratégiques et des faibles efforts, grands bénéfices ; priorisez. Laissez ensuite les membres repartir avec chacun une initiative en amélioration continue possible de mettre en œuvre d’ici les 3 prochains mois et répétez. Avec cette formule, les gens auront été consultés, impliqués, responsabilisés et les résultats seront multipliés.
4- Ne pas improviser. Formez les gens
Il peut être tentant d'improviser à faire de l’amélioration continue, mais croyez-moi, la pratique d’amélioration continue est une profession en soi si l’on souhaite obtenir de réels résultats. Tellement d’outils sont disponibles, que ce soit le Lean management, le Kaizen, les nombreux outils d’analyses, les matrices et arbres décisionnels, les outils de résolution de problèmes et j’en passe. Faire de l’amélioration continue demande certaines habiletés pour utiliser ces outils. Investissez dans une bonne formation, vous en ressortirez gagnant. Selon la taille de votre organisation, vous pourriez commencer par des formations Lean ceinture blanche par exemple pour les gestionnaires, ou une ceinture verte pour un praticien par équipe. Ces formations de base sont plutôt courtes (de 1 à 5 jours) et pertinentes. Par la suite, il faut pratiquer. Ces formations vous éviteront beaucoup de perte de temps, elles vous permettront de démarrer avec un coffre à outil approprié et vous rendront plus crédible en plus de vous permettre de parler le même langage que vos collaborateurs du domaine et d’obtenir un retour sur investissement assez rapidement.
5- Faites de l’amélioration continue une activité au quotidien
Les entreprises innovantes permettent à de petites équipes de se rassembler chaque semaine pour discuter d’une petite amélioration au processus à mettre en œuvre. Ils peuvent également utiliser le management visuel et les salles présentielles et virtuelles caucus afin de favoriser l’activité collaborative. Le style de gestion de projet en mode agile est un autre exemple où différentes itérations sont revues. Les rencontres scrums du matin, les tableaux visuels de type Kanban, les plans de projets Gantt, les canaux et site collaboratif tel SharePoint, peuvent aussi servir comme outils visuels. Un rapide appel matinal pour tous se lancer vers l’amélioration de la journée de la semaine peut faire l’affaire si cette amélioration est alignée et cohérente avec les objectifs. L’amélioration continue est quelque chose qui doit être revu régulièrement. La routine est la clé pour la maintenir.
6- Mesurez les résultats
Parce qu’on ne peut pas améliorer ce que l’on ne mesure pas, l’amélioration continue est axée sur les métriques. Pour connaitre d’où l’on part et où l'on va, il faut mesurer. Privilégiez une seul mesure clé de performance en lien avec l’objectif plutôt que de nombreuses mesures non essentielles ou superficielles. Choisir le bon indicateur demande du temps et de la réflexion. Est-ce que vous visez à améliorer la qualité d’un service, les coûts de production d’un produit, les délais de livraison ? Selon le scénario, fixez-vous un objectif SMART (spécifique, mesurable, atteignable, réaliste, dans un délai-temps raisonnable), puis collectez les résultats entre chacune des actions d’améliorations. Il faut évaluer si les actions entreprises portent fruit. Cela peut prendre du temps, mais c’est la seule façon de prendre les bonnes décisions. En effet, mesurer permet de prendre des décisions basées sur des faits (plutôt que sur des perceptions ou des émotions). Les entreprises les plus performantes ont en place depuis longue date des systèmes de données permettant de mesurer, tant à l’interne qu’à l’externe, la performance de leur entreprise. Pour ce faire bien sûr, il faut des données de sources fiables et à jour. Investissez dans vos systèmes TI si vous le pouvez ; vous n’en verrez que des avantages. Il est toutefois possible de mesurer sans grands investissements, mais cela peut demander plus de temps, plus d’argent, et peut générer des erreurs.
7- Communiquez
Gardez le plus souvent possible tout le monde au courant de ce qui se passe. Partagez la vision de l’organisation ainsi que son plan pour y arriver à court et moyen terme n’est pas seulement souhaitable, mais nécessaire. Il est important également de communiquer dans un langage accessible et clair pour l’auditoire cible, mais également de fournir de l’information pertinente. Par exemple, quels sont les objectifs de l’organisation ? Pourquoi se servir de l’amélioration continue pour atteindre ces objectifs ? Communiquez les résultats obtenus, ceux-ci parlent souvent d’eux-mêmes. N’ayez pas peur de vous montrer authentique et transparent. Communiquez du haut vers le bas, du bas vers le haut, de façon transversale, etc. Tous les moyens sont bons. L’important, c’est d’informer et encore une fois, sur une base régulière et de différentes façons. Si vous n’avez pas de système de gestion de la qualité et de la performance, soyez créatif, de nombreux moyens existent : utilisez la voix de vos dirigeants, votre site corporatif, l’intranet, les tableaux visuels, les infolettres, les rencontres d’équipe, etc. Une bonne réflexion sur votre gouvernance de communication peut s’avérer un exercice pratique pour débuter.
8- Soyez patient et gérez le changement
La création d’une culture d’amélioration continue est un exercice de longue haleine. Vous aurez donc besoin d’un engagement constant de la part de tous et d’une énergie durable. Malheureusement, dans le monde actuel, tout va très vite, tout change et tout est souvent à refaire. Il n’y a rien de plus permanent que le changement ; c’est un fait et l’amélioration continue est un excellent exemple de changement en continu sans fin et destiné aux fervents de la proactivité et de la recherche constante de toujours faire mieux. Toutefois, pour qu’un changement soit durable, il faut respecter le temps nécessaire pour y arriver. En effet, une mentalité opérationnelle de recherche de gains rapides, prête à laisser tomber aux moindres obstacles ou par insatisfaction des résultats court terme n’est peut-être pas prête pour l’amélioration continue ni une organisation confortable avec le statuquo.
Je conseille toutefois à tous ceux et celles désirant se lancer dans une telle approche de ne pas négliger l’élément le plus important, soit la gestion du changement. De nombreux livres, méthodologies et écoles de pensée suggèrent des pistes intéressantes pour mieux réussir les changements. Personnellement, la méthodologie ADKAR de Prosci m’intéresse particulièrement puisqu’elle s’incorpore facilement à la méthodologie DMAIC de l’amélioration continue. Voici en un tableau synthèse les différentes étapes de l’amélioration continue six sigma (DMAAC), ainsi que les étapes ADKAR de Prosci en gestion du changement qui selon moi, vont chacune de pair avec leurs 5 étapes.
DMACC (Six sigma) | ADKAR (Gestion du changement) |
---|---|
Définir | (Awarness) / Sensibiliser |
Mesurer | (Desire) / Créer le désir de changer |
Analyser | (Knowledge) / Apprendre, formation |
Améliorer | (Ability) / Habileté |
Contrôler | (Reinforcment) / Renforcement |
Nous pouvons facilement voir dans ce tableau que chacune des étapes du DMAAC offre l’opportunité de gérer le changement. Lors de l’étape « Définir » par exemple, nous identifions la problématique à résoudre en amélioration continue ainsi que l’objectif SMART à atteindre. C’est à cette étape qu’il est important de communiquer le QUOI, créer l’éveil face au changement et sensibiliser au besoin de changer. Puis, lors de l’étape « Mesurer » du DMAAC, les données recueillies peuvent ensuite être communiquées afin de créer le désir du changement, créer un sentiment d’urgence. C’est aussi le temps de communiquer une vision inspirante. Lors de la phase « Analyser », les parties prenantes au projet ont de nombreuses opportunités d’apprendre et de développer des compétences, puisque l’approche implique les équipes dans les différents ateliers permettant de trouver les causes fondamentales aux problèmes par eux-mêmes. Lors de la phase « Améliorer », les équipes participent ici à des ateliers permettant de trouver des solutions par différentes techniques de « brainstorming », permettant à tous de développer leurs habiletés en résolution de problèmes, en plus de supprimer les obstacles par eux-mêmes, gérer leurs propres résistances et créer un fort sentiment d’appartenance et mettre en place des solutions, ce qui est tout à fait facilitant en gestion du changement. Finalement, la phase « Contrôler », durant laquelle les mesures sont reprises, le nouveau processus est suivi, contrôlé et renforcé par les différents messages. C'est une opportunité de répéter les messages clés, communiquer les succès, reproduire le processus et renforcer l’adhésion au changement.
9- Célébrez
Finalement, je terminerais avec l’importance de célébrer les bons coups ! Ne négligez surtout pas cette étape qui peut s’avérer toute simple, mais tellement significative pour mobiliser les équipes en plus d’être une belle opportunité de faire de la reconnaissance. Surtout, n’oubliez pas : le changement vivra à travers les humains et ce sont souvent ces mêmes humains qui seront appelés à faire de nouveaux changements. D’où l’importance de terminer sur une note positive afin de poursuivre l’instauration de sa culture en amélioration continue.
1 Les mégadonnées (big data) : une source de croissance pour les entreprises