Conseil en management
Impact du bien-être au travail
sur les performances organisationnelles
Publié le : 11 février 2019
42%. Ce chiffre représente la portion du temps éveillé moyen passé au travail et en voyagement associé. Pendant près de 35 ans, 42% de notre temps actif sera donc consacré à des obligations professionnelles. Ce constat porte à réflexion lorsque certaines études évaluent entre 30[1] et 66%[2] la proportion des salariés qui se considèrent désengagés ou passifs face à leur employeur. En d'autres termes, 2 à 3 employés sur 5 entrent au travail sans être motivés à contribuer à la performance de leur organisation.
Peut-on se permettre de supporter un tel fardeau, alors que la compétition est grandissante et qu'on accorde de plus en plus d'importance aux enjeux sociaux et environnementaux ? Mesure-t-on réalistement l'ampleur des coûts associés à ce mal-être ? Et surtout, aborde-t-on le problème de la bonne manière ?
Les coûts du mal-être au travail
Climat de travail malsain, conflits non résolus, manque de reconnaissance, surcharge de travail constante, ne sont que quelques exemples de situations qui ont un impact direct sur la motivation et qui peuvent mener à des épuisements professionnels ou des départs. Souvent intangibles, ces éléments peuvent pourtant entrainer des coûts importants pour les entreprises en termes de CNESST, assurances, roulement de personnel, etc. Ceux-ci ont été estimés à 16,6 milliards de dollars en 2012, uniquement au Canada[3]. S'ajoutent à cela des coûts indirects tout aussi importants, mais souvent négligés, tels que perte de productivité causée par le manque de personnel, employés temporaires ou en formation, ou encore, problème de présentéisme.
Il apparait pertinent de s'attarder à ce dernier phénomène, car contrairement aux perceptions, le présentéisme pourrait représenter des coûts deux à trois fois supérieurs à l'absentéisme[4]. Certaines organisations vont jusqu'à l'encourager, d'une certaine manière, que ce soit par l'absence de congés maladie, la nécessité d'un billet médical ou encore par la culture même de l'entreprise. Qui n'a jamais entendu de commentaires comme : « Je fais une pneumonie sévère, mais j'ai trop de travail, je ne peux pas me permettre de prendre une journée de congé », « ma mère est entrée d'urgence à l'hôpital hier soir, mais mon boss va me tomber dessus si je ne rentre pas travailler » ou encore, « je n'en peux plus de ma job, mais ai-je vraiment le choix ? Les factures ne se paieront pas toutes seules ! » Dans tous les cas, il s'agit de salariés qui se présentent au travail alors qu'ils ne sont pas disposés, ni mentalement ni physiquement, à être pleinement performants. On peut s'interroger sur les avantages réels de cette culture, tant pour les employés que les organisations.
Une responsabilité partagée ?
Il serait facile ici de jeter le blâme sur les individus, se convaincre qu'il s'agit d'éléments personnels hors du contrôle de l'organisation. Il est vrai que la motivation demeure intrinsèque, mais on se questionne de plus en plus sur la pertinence et l'efficacité des modèles classiques de gestion, davantage patriarcaux et directifs. Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce virage : l'évolution des mentalités, le besoin grandissant d'équilibre et d'épanouissement dans toutes les sphères de vie, la présence des femmes salariées qui entrainent un partage différent des tâches familiales, mais également une nouvelle dimension en milieu de travail, l'accès à l'information et à l'éducation, pour ne nommer que ceux-ci.
Et maintenant...
Il s'agit d'établir de nouvelles bases sur lesquelles s'appuyer afin d'adapter les styles de gestion aux réalités contemporaines. Plusieurs théories explorent de nouveaux horizons, dont l'autodétermination. Celle-ci considère trois besoins physiologiques fondamentaux, soit l'autonomie, la compétence et l'affiliation (ou l'appartenance sociale), qui doivent tous être comblés pour optimiser les performances. La sécurité psychologique[5] constitue un autre thème qui suscite un intérêt grandissant. Elle implique notamment un climat de confiance et de respect au sein d'un groupe, qui peut certainement avoir un impact favorable sur la performance.
Les pistes de solutions concrètes sont multiples pour favoriser le bien-être au travail et ainsi aller chercher un retour sur investissement pouvant atteindre 1,64$ à 4$ par dollar investi[6]. Tout ce qui touche la conciliation travail - vie personnelle demeure très actuel, comme la flexibilité, tant dans les horaires que dans la prise de congé ou l'accès à des retours au travail progressif. Un environnement physique adéquat et agréable influe certainement sur le bien-être général.
Par contre, les pratiques de gestion demeurent sans doute la plaque tournante dans les changements à apporter, tant dans l'attitude des dirigeants, qui doivent être des modèles, que dans leur approche avec leurs employés. On cherche maintenant des leaders qui sauront reconnaître et miser sur les forces de chacun, impliquer ceux-ci dans les décisions et les considérer comme des joueurs clés pour atteindre les performances souhaitées et même les dépasser. « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ».
[1] Le moral des employés plonge partout... sauf au Canada, Olivier Schmouker, 24 mars 2017, Blogue Les Affaires.
[2] Dufresne, P. (2018, automne). Pour un leadership ferme et bienveillant. e-magasine du livre et des affaires , p. 26.
[3] Absentéisme dans les organisations canadiennes. Tiré de Quand les employés manquent à l'appel, Le conference board du Canada, septembre 2013.
[4] Presenteeism: At Work—But Out of It, Paul Hemp, Harvard Business Review, octobre 2004
[5] À la source de la performance durable : sécurité psychologique, bienveillance et intelligence collective, Portevin, P., e-magasine du livre et des affaires , p. 11, automne 2018.
[6] ENTREPRISE EN SANTÉ : Investir dans la santé de vos employés, un choix qui rapporte !, p. 18, Manuel de formation MPA, Gouvernement du Québec, 2013.