Je lance un pavé dans la mare : 20 ans à graviter autour du marché du recrutement de cadres et deux chasseurs de têtes se sont vraiment intéressés à moi. Heureusement pour le narratif, je suis encore en communication avec les deux. La cinquantaine d’autres chasseurs de têtes que j’ai côtoyés au fil des ans ont disparu du paysage, silence radio. Faites le ratio.

Sans fioriture, cette expérience des 20 dernières années me permet de tirer une amère conclusion : l’activité de chasse de têtes est clairement brisée. Je réalise à quel point l’activité de recrutement est accomplie de façon transactionnelle. À ma grande surprise, nous sommes dans un marché de commodité. Cette manière désinvolte de faire les choses doit cesser, car elle se fait au péril de la santé mentale de nos talents, de la réussite de nos entreprises et, plus largement, de notre pouvoir économique.

Faire comme avant, c’est se déprimer et bruler nos occasions d'affaires. Stop ! On arrête de cocher des cases et de remplir des chaises comme des robots. Si vous avez des ambitions stratégiques associées à votre recrutement, il est grandement temps d’évoluer en termes de pratiques.

Embaucher pour demain

Faisons un petit pas en arrière : l’activité de recrutement de cadres devrait être noble, importante et exaltante. On bâtit le futur. Parce que, attention, on n’embauche pas pour hier ou aujourd’hui, mais bien pour l’avenir. On ne regarde pas l’arbre, mais plutôt la forêt. On ne tire pas du fusil en l’air, on vise précisément la cible. Voulez-vous d’autres images ? L’éléphant est dans la pièce.

Si nous voulons fleurir, il faut se démarquer, revenir à une certaine forme de rationalité. Paradoxalement, il faut aussi ajouter une importante dose de créativité. Il faut se ressaisir, se repositionner. S’il est nécessaire de poser les vraies questions, il est encore plus important d’écouter les réponses. Est-ce que la culture en place ou l’assemblage actuel des compétences permet d’exécuter la stratégie ? Est-ce que nous avons le niveau de créativité nécessaire dans notre organisation pour faire face à l’innovation de nos compétiteurs ?

Revenons aux deux bons chasseurs de têtes avec lesquels je suis encore en relation. Au moment où j’ai rencontré le deuxième, il était déjà trop tard pour moi. Candidat désabusé du marché du recrutement exécutif, j’avais déjà décidé de créer mon propre job. C’est alors que j’ai fondé une entreprise en gestion immobilière. Un peu plus de sept ans après avoir lancé mon entreprise, avec l’aide de mon équipe, je peux affirmer humblement, sans réserve, que nous avons perturbé (disrupted dans un anglais d’affaires) le marché immobilier de la copropriété du Québec.

Après une surcroissance rapide et sans répit de mon entreprise, une offre d’achat non sollicitée est arrivée sur la table, nous étions alors en 2021. J’ai donc vendu et pris une pause professionnelle. Je me suis recentré. J’en ai profité pour passer du temps de qualité avec ma petite famille (et jouer une cinquantaine de parties de golfs durant mon été).

Jeune retraité, il ne suffit que de quelque temps pour que mes deux chasseurs de têtes préférés – que j’ai continué à fréquenter professionnellement durant toute ma période entrepreneuriale – ne sentent l’odeur du sang. En l’espace de quelques mois, les deux m’ont proposé, tour à tour, d’entrer dans leurs entreprises respectives. Ça aura certainement pris quelques mois pour me convaincre. Vous comprenez maintenant certainement pourquoi ! J’ai finalement accepté de rejoindre un des deux, nous étions alors au début de 2022.

Changement de paradigme

Comme si l’aventure en immobilier n’avait pas été assez exigeante, sans jamais m’en douter, j’étais prédestiné à perturber un second marché. Celui du recrutement de cadres !

Je regarde aujourd’hui dans le rétroviseur et je dois dire que ces deux dernières années passées avec ma nouvelle équipe ont été très enrichissantes. On m’a littéralement donné les clés d’un petit laboratoire de recherche en me permettant d’étudier le modèle d’affaires, et encore davantage le marché du recrutement de cadres dans sa globalité. J’avais déjà été candidat, puis client. Je disposais cette fois d’une chance unique d’avoir une vue imprenable de l’intérieur.

Mon parcours bien singulier me donne envie aujourd’hui de proposer une première action structurante dans mon nouveau marché. Un changement de paradigme. Je vous propose d’éliminer immédiatement la fonction de « chasseur de têtes » pour la remplacer par celle de « stratège en recherche de cadres ». Par cette action, je mets officiellement au pilori l’approche transactionnelle. À partir d’aujourd’hui, je vous offre donc de faire les choses de façon plus stratégique, avec l’ambition de faire du recrutement un processus qui s’inscrit dans une vision globale et à long terme de l’entreprise; une pierre d’assise pour une création de valeur économique, mais aussi de valeurs afin de soutenir une culture performante.

Changeons le discours, améliorons l’approche. Prenons davantage de temps en amont, au lieu d’agir en réaction. Les erreurs en matière d’embauche de dirigeants coûtent trop cher aux entreprises (et aux talents). Pour commencer, si on veut trouver de bons patrons, il va falloir les approcher en parlant leur langage. Un « stratège en recherche de cadres » peut élever le niveau de conversation et amener à la table les meilleurs talents, performants et pertinents, dans le contexte unique de votre entreprise.

Je dois m’interrompre, car je dois justement discuter de stratégie avec un client. Je m’excuse, mais ne partez pas trop loin. Dans ma prochaine chronique, j’aimerais vous fournir davantage de contexte et de données. S’ensuivra la description du nouveau poste de « stratège en recherche de cadres ». Je réfléchis aussi à vous donner ma recette.